BLITZ!

LES CHRONIQUES DE L´ADEPTE – BLITZ! Numéro 19

SWANS « White Light From The Mouth of Infinity »
+« Love of Life » ´Deluxe édition, 3XCD´ 2016
(Mute Records/ CD Stumm377, Young God Records/YG49)

Swans

Swans est un groupe issu du rock underground new-yorkais formé en 1982 autour de Michael Gira (chant et guitares) et de Roli Mosimann (percussions). Ce dernier quittera le groupe en 1985 pour aller produire un groupe suisse (il en est originaire), les Young Gods. Il sera remplacé par Ted Parsons (Prong/Godflesh) et la formation restera alors à peu près stable avec l´arrivée de Jarboe (claviers, voix) dès 1986 et jusqu´à leur séparation en 1997.

Un autre guitariste (Norman Westberg) jouera le rôle de seconde main jusqu´à cette période évoquée ici (1991/92) avant d´être remplacé par Clinton Steele (1991/97), sans oublier la présence du bassiste Algis Kisys, qui officie au sein des Swans depuis déjà un moment et sera présent sur ces deux albums séminaux. Mais la force de ce groupe repose sur la présence à chaque album de deux, voire trois batteurs (comme ce fut le cas sur les 2 albums de 1986 « Greed » et « Holy Money »), sur le magnifique « Children of Gods » (de 1987) on ne retrouve plus que la frappe si particulière de Ted Parsons. Après l´album « The Burning World » (1989) enregistré en trio (M.Gira, Jarboe et N.Westberg) avec l´aide de musiciens de studio produit à Brooklyn par Bill Laswell (Material, PIL), le groupe profite de l´année 1990 pour se réorganiser et produire deux œuvres majeures, en fait un dyptique : « White Light From The Mouth of Infinity » (1991) et « Love Of Life » (1992) avec la sortie d´un live officiel entre les deux. Les pochettes, aux couleurs similaires, seront elles dessinées par Michael Gira.

« White Light From The Mouth of Infinity », sur la pochette duquel on peut voir un lapin tenir une carotte sur une mare de sang en forme de cœur est un double album assez violent (toutes proportions gardées puisque le groupe s´est assagi depuis 1988 avec le single « Love Will Tear Us Apart », qui sera classé dans les charts indépendants avec cette cover de Joy Division). La musique des Swans est ici plus sombre et tourmentée avec ses riffs de guitare assassins que n´auraient pas reniés leurs compatriotes de Sonic Youth comme le démontrent les terribles « Power and Sacrifice » ou « You Know Nothing ». Quelques plages plus apaisées nous permettent d´entrevoir la lumière tels « Better Than You » qui ouvre ce double L.P ou « Song For Dead Time » chanté par Jarboe, l´orage n´est pas loin et cet album, tout en retenue, nous le confirme avec ces savoureux moments que sont « Love Will Save You », « Failure » et « Miracle of Love ».

Swans, Love Of life

Le 2ème CD contenu dans ce coffret « Deluxe Edition » (un bien joli digipak) renferme l´album suivant, « Love of Life » (1992) plus mélancolique et moins énervé que son prédécesseur (même si la tension reste palpable) avec des morceaux de bravoure tels le titre éponyme ou « The Other Side of The World » (là encore chanté par la voix magnifique et tourmentée de Jarboe). Contrairement à ce que laisse présager la pochette aux deux lapins en train de flamber par la tête, ce disque est plus posé que le précédent et offre aux fans de Swans ce qui reste sans doute leur chef d´oeuvre absolu, comme le démontre ce « God Loves America » qui ferme presque le CD puisque comme sur la version originale (YGCD05), le titre « No Cure For The Lonely », calme et flamboyant est aussi rajouté en bonus track. À noter que plusieurs plages instrumentales sont incluses dans l´album dont les titres s´enchaînent à merveille.

Cette édition deluxe ne s´arrête pas là puisque le label Mute (à l´origine de la réédition du back catalogue des Swans, tout comme ce fut le cas il y a une dizaine d´années pour celui des Virgin Prunes) nous offre un CD « bonus material » rempli de pépites : chutes de studio, rehearsals (titres enregistrés en répétition) et live divers dont on peut retrouver certains titres sur le concert intitulé « Omniscience » (la pochette du livret de ce coffret étant celle de ce concert mythique des Swans). Certains titres figurent ici dans des versions longues (le single « Love of Life » et sa face B « Amnesia »), 2 titres extraits d´ « Omniscience » (« Mother´s Milk » et « Amnesia »), ainsi que des titres de SKIN (le projet parallèle de Jarboe/ Gira) avec les excellents « No Cruel Angel », « Dream Dream » et « Please Remember Me » pour une durée totale de 80 minutes. Vous en reprendrez bien un peu ?

Et sur le web : www.younggodrecords.com

L´adepte

SPK « Paradiso » (2015 Therapeutic/Adverse Recordings, OPSPK3)

SPK, Paradisio

Bientôt 30 ans que l´on n´avait plus de nouvelles de ce groupe australien de musique industrielle bruitiste formé à Sydney en 1978 autour de Graeme Revell (The Operator), infirmier psychiatrique et un patient atteint de schizophrénie, Neil Hill (alias Ne/H/il) rejoints en 1980 par Dominic Guerin (Tone Generator). Après avoir signé quelques singles(« Mekano »/ « Slogun ») chez Industrial Records (Le label de Throbbing Gristle), SPK sort 3 albums séminaux de musique post-apocalyptique remplis de bruit (blanc) et de fureur. Le groupe est réputé (tout comme TG en son temps) pour avoir fait saigner les oreilles du public en live à l´aide d´infrabasses notamment.

Après l´album compilation « Autodafé » (sous le nom de SePpuKu, le groupe changeant de nom à chaque disque!) SPK perd 2 de ses membres avec l´arrivée de la chanteuse Sinan (qui collabora à l´album « Leichenshrei »), Mme Revell dans le civil, dont Neil Hill qui se suicidera en 1984.

La carrière du groupe prenant un aspect plus commercial dès 1984 avec le tube « Metal Dance » avant de revenir en 1986 à une musique plus intimiste avec l´album « Zamia Lehmanni » présenté ici dans sa quasi-intégralité sur ce live enregistré au Paradiso d´Amsterdam (avec la complicité de Brian Williams à la table de mixage, ce qui explique sans doutes le son excellent, voire énorme de ce set). SPK signe ici un concert d´excellente facture avec des sommets tels « In Flagrante Delicto » ou « In The Dying Moments », sans oublier l´inédit « Dies Irae » que l´on retrouvait sur le live posthume de 1987 « Oceania », chanté par Graeme Revell, qui conclut de fort belle manière cet album enregistré le 30 mai 1987 lors de leur tournée d´adieux. On regrettera seulement ici l´utilisation de bandes (le groupe étant réduit au duo Sinan/Revell) malgré l´apport de percussions qui font de ce concert un moment d´exception.

Dominic Guerin, qui s´exprima à l´époque sur son départ d´SPK (il était à l´origine des montages vidéo diffusés sur scène) dira qu´il n´était pas d´accord avec la voie commerciale que le groupe empruntait alors. Son témoignage fait partie du prologue du DVD « Despair » sorti en 2008 sur son label Twin Vision. Graeme Revell quant à lui poursuit une carrière comme compositeur de musiques de films pour Hollywood (Dead Calm, The Crow...).

À noter qu´il existe une version vinyle de ce CD incluse dans le coffret « Working Cycle Transmission » regroupant cinq 33 tours et deux 25 cm de bribes de concerts enregistrés à différentes périodes de la carrière du groupe avec de nombreux instants de bravoure.

L´adepte