Youth (de son vrai nom Martin Glover) partage son studio (Butterfly) avec un certain Greg Hunter (lui aussi remixeur) car c'est bien de remixes de Killing Joke dont il s'agit ici !
De dub, il est également question, puisque Youth a baigné tout jeune dans les vapeurs de ganja jamaicaine, d'où il puise sa source en tant que remixeur de talent (Art of Noise, Alien Sex Fiend, The Mission, Suns of Arqa...) et possède comme ces derniers une culture dub puisqu'il a grandi dans le quartier métissé de Notting Hill à Londres.
Mais ce portrait ne s'arrête pas là puisqu'il est surtout connu pour avoir été le premier bassiste de Killing Joke sur 2 albums (« Killing Joke » en 1980 et « What's This For.. ! » en 1981). C'est lui le responsable de l'aspect dub de Killing Joke (avec un son de basse parfois proche du funk !). Enfermé durant 3 décennies dans son studio londonien, il nous a concocté ici un mélange de dub et d'ambient (un autre domaine qu'il maîtrise bien !) pour en tirer des remixes assez inégaux dont seul le 2ème CD intitulé « Rockers Retroactive », rempli de pépites nous ravit les oreilles.
Le premier CD, intitulé « Apocalypse Dancehall » porte bien son nom, puisque outre son côté dancehall (la voix de
Brother Culture y est pour beaucoup !), il contient également des titres rock apocalyptiques (la marque de fabrique
de Killing Joke) mais à la sauce dub, tels ce « Money is not Our God », bourré
d'amphétamines, « Labyrinth Dub » et « Eighties » (« Voodoo Dub ») nous sortent de notre torpeur avec
des riffs de guitare et une basse répétitive qui, alliées aux percussions tribales, nous mènent vers une transe hypnotique !
Le remix de « Love Like Blood », plus ambient, est le sommet de cette première face, qui s'achève sur deux remixes
dancehall (émanation du dub sur lequel un toaster pose son phrasé) plutôt inutiles ici !
Le 2ème CD (autrement dit la face B du disque) fait la part belle aux remixes ambient, notamment avec les 10' d'ouverture de « Requiem » (remixé ici par Thrash de The Orb), qui était déjà paru dans le commerce. « This World Hell » et « Pandemonium » (sur l'album éponyme de 1994) étant les 2 titres les plus « pêchus » de « Rockers Retroactive ». « Exorcism » (qui avait déjà fait l'objet d'un CD 5 titres au magnifique design et limité à quelques milliers de copies), présent ici sous format éthéré appelé « Vatican Ambient Dub » est un remix moins trance que l'original (enregistré dans la grande pyramide au Caire!). Qui a dit que Killing Joke était versé dans le mysticisme ? Dans l'occultisme certainement, puisque Jaz (Coleman) est inspiré (dans ses textes entre autres) depuis longtemps par les pratiques magiques et chamaniques qu'il partage avec Youth, comme en témoignent les sous titres aux noms évocateurs (« Kilimanjaro Dub » pour « Primobile » ou « Urban Primitive Dub » pour le fameux « Tomorrow's World »).
« Another Cult Gs Down » (« Portobello Mix ») et son dub extrêmement « roots » concluant cette face B de fort belle manière.
Le troisième disque est un CD bonus rempli de remixes technoides (« In Cythera », « Change ») ou carrément electro « Follow The Leaders », « Democracy » remixé lui par Nine Inch Nails !).
Le dub, lui, conclut le CD avec « Requiem », dans une version au son bien crade, et surtout « Killer Dub » (que l'on retrouvait déjà dans sa version intégrale de 19' sur « Chaos For Breakfast », la compilation de singles 1979-1981 qui rendait hommage aux 25 ans de carrière du groupe en 2004) dans une version épurée de 5' qui laisse un peu sur sa faim ! (d'autant qu'avec une moyenne de 60 minutes par disque, la version originale n'aurait pas démérité ici !).
« Bonus tracks », sans être un disque transcendant, donne plutôt un sentiment de remplissage que justifie le prix excessif de ce triple CD (hé oui, le CD bonus est payant !).
Cette nouvelle compilation de Killing Joke, sans référence ni code barre se dégustera sans limites, à moins que vous ne soyez allergique au dub ! Pour les fans de la blague qui tue principalement.
Killing Joke sur le Web : http://www.killingjoke.com
Il y a des jours comme ceux-là où l'angoisse de la mort se fait plus prégnante que d'autres ! C'est le cas lorsque l'on se souvient que 10 ans plus tôt (le 13/11/2004) décédait subitement John Balance (on ne reviendra pas sur les circonstances de sa mort...). Pour un alcoolique, l'espérance de vie est très limitée et le leader de Coil (avec Peter Christopherson, décédé lui en 2010) avait compris (« and the ambulance died in his arms », l'enregistrement de leur concert au festival All Tomorrow's Parties en est témoin !) qu'il fallait absolument laisser une empreinte sous le nom de Coil. Il se remet à jouer live (aucun concert n'avait eu lieu depuis les débuts de Coil en 1984 !) et sort à la fin des années 90 de nombreux disques sous divers pseudonymes (Elph, Coil vs The Eskalator, Black Light District, Rosa Mundi...).
Après avoir quitté Londres pour s'installer près de la Manche, plus au sud, Coil s'intéresse alors à l'eau et à l'influence de la lune en créant un diptyque consacré à ce qu'il nomme « moon music », un concept axé sur la musique ambient et dédié au disque lunaire. Le groupe est constitué alors également de Drew Mc Dowall et Thighpaulsandra (ancien clavier de Julian Cope) et possède une grande collection de synthétiseurs dont ils se servent ici avec brio.
L'album démarre sur « Are You Shivering ? », un titre rempli de beeps et de glitchs avec un son de guitare (ou ce qui y ressemble, Christopherson ayant l'habitude de tout transformer via son Mac) lancinant et l'on constate que la voix de John a gagné en maturité (elle est plus grave et plus profonde) avant d'enchaîner avec « Red Birds... », un titre instrumental de 12'40 composé par Thighpaulsandra sur un synthétiseur analogique (le SH101 de Roland ), morceau épique rappelant certains travaux du groupe allemand Tangerine Dream constituant le hors d'uvre de l'album. « Red Queen » et « Brocoli » (sur lequel on peut entendre la voix de Sleazy) sont 2 titres anecdotiques qui accentuent l'aspect frigorifique de l'uvre !
Le titre suivant « Strange Birds » est un morceau moyen sur lequel on peut entendre des chants d'oiseaux enrobés de beeps et divers crépitements, sans doute le plus expérimental de ce 6 titres.
« Music To Play In The Dark » s'achevant sur « The Dreamer is Still Asleep », axé principalement sur une boucle de basse, un titre rappelant quelque peu la cold-wave du début des années 80, Coil ayant déjà exploré depuis ses débuts de nombreux styles, l'indus bien évidemment, mais aussi le jazz, le dub et la techno, voire l'ambient comme le suggèrent ces deux volumes de « Music To Play In The Dark » dont les pochettes sont réalisées par Peter « Sleazy » Christopherson.
Web : www.brainwashed.com/coil for latest news.
Coil revient peu de temps après pour un nouveau volume de « Music To Play In The Dark », naviguant toujours entre deux eaux : le dark ambient d'un côté et l'expérimental de l'autre.
MITPITD2 est presque similaire au premier, si ce n'est le line-up car aux côtés de John Balance et Peter « Sleazy » Christopherson, toujours Thighpaulsandra, mais Drew McDowall a laissé sa place à sa femme Rose McDowall (dont on peut entendre également la voix sur les uvres de Current 93 et Death In June). Cette fois-ci 7 titres se partagent la galette.
Cela commence avec « Something », sur lequel la musique est quasi absente et où l'on entend John répéter le titre ad infinitum. « Tiny Golden Books » est dans la lignée de « Red Birds... » sur le premier opus, en cela que les synthétiseurs (très présents) et la voix de John, vocodée, nous rappelle également Tangerine Dreams, voire Kraftwerk (période « Autobahn »).
« Ether » et « Paranoid Inlay » reviennent à des titres chantés, le dernier faisant référence à la paranoïa liée à l'usage inconsidéré de drogues de synthèse (la MDMA ou extasy), alors que « Ether », joué au piano est lui lié au 5ème élément de l'alchimie.
« An Emergency » est un titre court sur lequel on peut entendre la voix de Rose, l'album s'achevant sur les énormes « Where Are You ? », sur lequel Rose fait les churs, et « Batwings », sur lequel la voix du chanteur de Coil monte dans des tessitures encore jamais atteintes et dans une langue que lui seul connaît.
« Serenity is a Problem » nous dit John sur « Paranoid Inlay », ici la sérénité se pose sans problèmes sur ces deux disques de musique à écouter dans le noir.
À noter que les 2 000 premiers exemplaires de chaque disque étaient au départ disponibles par souscription (afin de financer leur édition et le déménagement de Coil dans le Sussex), les pochettes différant selon les différentes éditions (le nom du distributeur n'étant parfois pas présent sur certaines !).