BLITZ!

DOSSIER BLITZ! Numéro 38

par le Général Hiver

Entête du Dossier

WHITEHOUSE,
LES PIONNIERS DU POWER ELECTRONICS

Fondé en 1980, le groupe anglais Whitehouse pose les bases du genre musical dénommé power electronics. C’est d’ailleurs William Bennett, membre de Whitehouse depuis sa création, qui évoque le premier cette expression dans le livret de l’album « Psychopathia Sexualis » sorti en 1982.

Qu’est-ce que le power electronics ?
Musique atonale, sans mélodie ni rythme conventionnel, le power electronics se caractérise par l’utilisation fréquente d’effets larsen, de grincements stridents et d’impulsions infra-basses créées avec les synthétiseurs analogiques. Quant aux textes, ils sont distordus, hurlés, parfois agressifs et subversifs.

Whitehouse apparaît précisément au moment où des groupes comme Throbbing Gristle ou SPK s’orientent vers une musique moins bruitiste et, toute proportion gardée, plus conventionnelle.
Le nom « Whitehouse » fait référence, non sans ironie, à une militante au discours moraliste, dénommée Mary Whitehouse, et à un magazine pornographique britannique.

William Bennett, ancien guitariste d’Essential Logic, cherche à « créer une musique qui puisse plonger le public dans la soumission ». Son premier projet s’appelle Come, il collabore avec Daniel Miller (responsable du label Mute Records) et J. G. Thirlwell (Fœtus), et forme Whitehouse en 1980. Deux ans plus tard, il est rejoint par Philip Best (âgé de 14 ans à l’époque, et qui a fugué du domicile familial). Whitehouse commence alors à jouer sur scène.

Les textes du groupe, souvent obscènes, dépeignent la noirceur de l’âme humaine et évoquent la pédophilie, la misogynie, les tueurs en série, le sadisme et toute forme de déviance perverse.
Le line-up de Whitehouse a souvent varié, et au nombre des collaborateurs ou membres temporaires, on pourra citer Peter Sotos, Steven Stapleton ou John Murphy.
Les titres des albums ne trompent pas sur leur contenu : « Birthdeath Experience » et « Total Sex » en 1980, « Erector » et « Buchenwald » l’année suivante, « Right To Kill, Dedicated to Dennis Andrew Nilsen » en 1983. Nilsen était un tueur en série nécrophile britannique né en 1945, à qui l’on impute une douzaine de meurtres avant son arrestation dans les années 80.

Après une période de silence durant la seconde moitié des années 80, Whitehouse fait son retour au début des années 90 avec plusieurs albums produits par l’Américain Steve Albini. Les ordinateurs ont remplacé l’équipement analogique et les paroles sont devenues plus profondes, William Bennett développant un intérêt pour la programmation neuro-linguistique. Des percussions sont parfois intégrées aux morceaux.
A partir de 1998, William Bennett assure lui-même le rôle de producteur.
Le projet Whitehouse prend fin en 2009, mais son influence sur de nombreux groupes du genre power electronics est incontestable.

Le concert du 30 mars 2003 au Volksbühne de Berlin (Allemagne) mérite le détour et donne un aperçu de la musique de Whitehouse, puissante et oppressante, mais aussi parfois entraînante :
https://www.youtube.com/watch?v=TYYQ6kSBpd0

L’excellent morceau « Why You Never Became A Dancer », extrait de l’album « Bird Seed » de 2003, constitue un exemple assez typique des textes de Whitehouse (très explicites) :

Can I suggest you:
Get fucked
While you lie about child-molesting gropes

And parkbench flashers and pervert creeps

And anal virginity and polaroid snaps
And verbal abuse and bathroom rapes

I don't know how well you can:
Remember your own pointless glue-sniffing adolescence

That fumbling floppy sex
In between fags
Those pathetic fistfights
All those pathetic petty thefts
And this and that and this and that and this and that
And every other fucking Adidas-clichéd cringe

Can I suggest you:
Pose
While you take another frantic glance at your shopwindow reflection
Ensuring the stinking lie is maintained
Because that's the difference between you
Yes, that's the difference between you
You'll let a leering scumbag beerdrinking rat
Raise your nostrils for a close-up smell
Of fingertip nicotine and animal fat
And force an open dead mouth
Lap up ounces of semichem sweat
So can you feel that:
Would be a truly truly disgusting thing?

And that's the difference between me
I'll open the package
I'll watch the show
I'll enjoy perfectly well-made art
I'll get in line behind stupidity
I'll let you lie through your teeth
I'll make you feel special
I'll not pick out the mistakes in public
I'll just put it down to passion
And feigned memory lapse

What did you want to be when you grow up?
Certainly not raped
That's the difference between you
A drunk? A drug addict
A motherly protector of the young?
Another bed-staining cunt?
A child molestor that needs to be told?
Or just a craven lust-driven artist
Channelling confusion and fear
Into a sickly limp repetitive craft
Yes, that's the difference between you
You'll act late and surprised
You say you loved sex?
You'll love being hated for the act
The filthier the abuse and the desperate underage details
The fatter the payback

So rather than just listen
Be altered by what's been said

Now that's the difference between me
I'll show you emotional truth
I'll show you the fucking source
I'll show you yet another fucking liar

And this is for the you
I'll show you that something that makes you:
Feel different
Feel special
I'll give you:
Thoughts
Images
Sounds
I'll give the you something
Even more interesting than the last one
And I'll tell you why it's the best one yet

And then you can look back on it all
And say:
This is the best thing that ever happened to me
And see:
Why you never became a dancer

Puis-je te suggérer :
Va te faire foutre
Pendant que tu mens à propos des pelotages d'enfants

Et les exhibitions sur les bancs de parc et les pervers

Et la virginité anale et les clichés polaroïd
Et la violence verbale et les viols dans la salle de bain

Je ne sais pas à quel point tu peux :
Souviens-toi de ta propre adolescence inutile à renifler de la colle

Ce sexe souple tâtonnant
Entre les tapettes
Ces bagarres pathétiques
Tous ces larcins pathétiques
Et ceci et cela et ceci et cela et cela et cela
Et tous les autres putains de clichés d'Adidas

Puis-je te suggérer :
Pose
Pendant que tu jettes un autre coup d'œil frénétique à ton reflet sur la vitrine
T'assurant que le mensonge puant est maintenu
Parce que c'est la différence entre vous
Oui, c'est la différence entre vous
Tu laisseras un rat qui boit de la bière
Lever tes narines pour te faire sentir de près
De la nicotine du bout des doigts et des graisses animales
Et forcer une bouche morte ouverte
A laper des onces de sueur semichem
Alors, peux-tu ressentir cela :
Serait-ce une chose vraiment vraiment dégoûtante ?

Et c'est la différence entre moi
Je vais ouvrir le paquet
Je regarderai l'émission
J'apprécierai l'art parfaitement bien fait
Je vais faire la queue derrière la bêtise
Je te laisserai mentir entre tes dents
Je vais te faire sentir spécial
Je ne choisirai pas les erreurs en public
Je vais juste mettre ça sur le compte de la passion
Et feindre un trou de mémoire

Que vouliez-vous être en grandissant ?
Certainement pas violée
C'est la différence entre vous
Un ivrogne ? Un toxicomane
Une protectrice maternelle des jeunes ?
Une autre chatte qui tache le lit ?
Un agresseur d'enfants qui a besoin qu’on parle de lui ?
Ou juste un lâche artiste motivé par la luxure Canalisant la confusion et la peur
Dans un métier répétitif maladif
Oui, c'est la différence entre vous
Vous agirez tard et surpris
Vous dites que vous aimez le sexe ?
Vous allez adorer être détesté pour l'acte
Plus les abus sont sales et les détails désespérés des mineurs
Plus le remboursement est gros

Alors plutôt que d'écouter
Être altéré par ce qui a été dit

Maintenant c'est la différence entre moi
Je vais te montrer la vérité émotionnelle
Je vais te montrer la putain de source
Je vais te montrer encore un autre putain de menteur

Et c'est pour toi
Je vais te montrer que quelque chose qui te fait :
Se sentir différent
Se sentir spécial
Je vais te donner :
Pensées
Images
Sons
Je vais te donner quelque chose
Encore plus intéressant que le dernier
Et je vais te dire pourquoi c'est le meilleur à ce jour

Et puis tu pourras tout regarder en arrière
Et dire :
C'est la meilleure chose qui me soit jamais arrivée
Et voir :
Pourquoi tu n'es jamais devenu danseur

Pour écouter « Why You Never Became A Dancer » :
https://susanlawly.bandcamp.com/album/the-sound-of-being-alive
Vidéos disponibles sur le label Susanlawly :
http://www.susanlawly.freeuk.com/videofiles/videofiles.htm

Whitehouse, Why You Never Became A Dancer
Whitehouse, Power Electronics

À noter qu’en 1986 une compilation a été éditée au format cassette à l’initiative de Joseph Nechvatal. Intitulée « Power electronics » et référencée no13 dans la collection Tellus « The Audio Cassette Magazine » de New York, elle rassemble des morceaux de Merzbow, Coup de Grace, Maybe Mental, Master/Slave Relationship, Controlled Bleeding, etc.